Versailles à PARIS [ 13 juillet 2010 ]

A peine plus de 3 ans après la formation du groupe, à peine 2 ans après leur dernier concert à Paris, à peine un an après le décès de l'emblématique Jasmin You, bassiste et membre fondateur du groupe, et à peine quelque mois après un 3e album studio, Versailles fait son retour dans la ville lumière. Paris.

Et les choses ont changé. Il y a 2 ans, bien qu’encore jeune, ce «all-star band» avant déjà bien rempli feu la Loco. Certes les groupies avaient été nombreuses, mais la passion qu’avait déchaîné le groupe, tenant encore une heure et demi avec simplement un EP et deux singles, agrémenté de quelques chansons d’Hizaki Grace Project, avait marqué les mémoires. Kamijo avait révélé son emprise sur le public, quasi hypnotique, Teru était sorti du carcan que l’immense talent reconnu d’Hizaki semblait confiner, et le groupe avait subjugué les fans, s’assurant certainement un public «vrai» extrêmement fidèle. Et en cette année 2010, c’est donc avec un statut complètement différent, et une histoire forte, chargée d’émotion, que Versailles débarquait de nouveau sur notre territoire.

Avant ce concert à Paris en 2008, j’avais pensé «Versailles il faut les voir une fois au moins, pour savoir ce que ça fait. Mais s’ils reviennent je retournerai pas les voir, ça serai pas la peine.» Comme quoi il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis, j’ai décidé, fort à propos finalement, d’oublier cette pensée à l’annonce du retour de Versailles. Malgré le changement de renommée, l’évolution musicale du groupe, la disparition de Jasmin You, Versailles reste un groupe qui mérite le déplacement.

Cette belle après-midi ensoleillée de juillet à Paris a commencé par la rencontre avec Kitsumi et Noyle, vêtues toutes deux pour l’occasion en circonstance, quand moi même restait fidèle à mon look «casual». On a beau aimer le visu et la provoque, on peut ne pas avoir envie de le crier visuellement parlant sur tous les toits (oui oui c’est très profond XD ) Nous nous rendîmes donc vers le Trabendo au parc de la Villette. La particularité de cette salle est sa propension à être introuvable en toute circonstances. Une sorte de camouflage optique l’entoure, à moins qu’elle ne se situe sur une brèche spatio-temporelle, du coup elle n’est jamais comme la dernière fois qu’on l’a vue, et sa position est aléatoire. Tantôt face au parking, tantôt face à un espèce de gouffre avec des collines sablonneuses, (gnéwtf?) ceux qu’y étaient verront de quoi je parle. (Ou pas)

Après un effort de concentration certain, nous pûmes donc atteindre l’estrade surplombant l’entrée de la salle. Une file d’une grosse cinquantaine de personne se tenait déjà derrière les barrières devant les portes. Un mini-van également. Une électricité perceptible flottait dans l’air chez les fans déjà attenant aux portes. Un hoquet général suivi de quelques cris, de surprise se mêlant à une frénésie fanatique remonta jusqu’à nous trois comme nous apercevions l'exubérante coiffure d’Hizaki, précédé des autres membres, sortir de la camionnette et se faufiler à l’intérieur de la salle. Nous arrivions juste au bon moment.

La suite de l’après-midi consista en divers occupations pour patienter, bercées par le son des balances qui perçait jusqu’à l’air libre depuis les entrailles de la salle. Ecrire un mot sur une bannière qui allait être déployée dans la foule, discussions entre membres communs de forums Versailles, notamment auprès de fans qui étaient présents quelques jours plus tôt au Rock Store de Montpel’. La rumeur voulait que le public avait eu du mal à se tenir, en particulier certain(e)s fans étranger(e)s et que le son était mauvais. Cela ne nous rassurait pas, dans la mesure où nous avions croisés les fans italiennes incriminée, et que je reconnaissais volontiers d’expérience l’acoustique du Trabendo comme plutôt bancale. Par ailleurs, ces rumeurs faisaient néanmoins cas d’un show léché, grandiloquent, spectaculaire, vibrant, en un mot: Versailles!

Comme l’après-midi touchait a sa fin, nous décidâmes de rejoindre la file d’attente. Afin de ne pas nous exposer au soleil, nous avions en effet préféré rester à l’ombre, sous un abri situé au dessus de la salle. La queue avait logiquement grandi depuis 13h, heure de notre arrivée, et nous préférâmes nous glisser au milieu de celle ci plutôt que de rejoindre le bout. File ou pas file, on était quand même là depuis 13h. Et bien qu’une certaine personne ne parût pas particulièrement apprécier, nous n’en avions que faire, et personne ne vit rien à redire au fait qu’on attendait depuis plusieurs heures, comme tout le monde.

Ma première constatation par rapport à la foule qui se massait là était que de nombreuses personnes étaient déguisées en membres du groupe, ou plus simplement habillées de façon visu, goth loli ou même avec quelque peu d'extravagance. Puis la foule avança inexorablement aux alentours de 19h vers les portes, bien évidemment surveillées par des vigiles qui régulaient le flot d’entrée et contrôlaient les sacs avant qu’on ne puisse entrer.

En entrant, je retrouvais le Trabendo et sa conception... bizarre? en forme de haricot. Autour d’une fosse devant la scène, la salle surélevée s’étire sur les cotés. Noyle, Kitsumi et moi choisîmes donc le coté droit, relativement face à la scène. Contre la rambarde, pour profiter au maximum d’une vue dégagée, d’un calme et d’une chaleur relative. Après à peine quelques minutes le premier évanouissement eu lieu. L’attente en plein soleil une journée durant, la chaleur, l’émotion, la tension et la foule avaient eu raison de cette première fan avant même l’arrivée du groupe sur scène. Après que la salle se fût pratiquement remplie, les lumières s’éteignirent. Le show allait pouvoir commencer.

Musique d’intro rappelant celle de Jubilée, public aux aguets, prêt à vibrer, mais la tension se prolonge. Et encore. Et encore, quelques minutes durant dans l’exaltation muette générale, puis dans un vivat de cris réjouis c’est Yuki qui fait son apparition depuis les coulisses. D’un pas lent, magistral, que je qualifierai de princier, il déambule le long de la scène avant de redisparaître. Il est suivi de Teru, rallumant plus vivement les hurlements de la foule. Allant crescendo ceux-ci s’enflamme quant c’est au tour d’Hizaki de parader sur scène, avant l'apothéose à l’apparition de Kamijo, qui a la faveur de ces demoiselles. Les membres s’installent à leur place, rejoints par Masashi, bassiste de session choisi pour la tournée, sobrement tout de noir vêtu, et qui se place en retrait derrière Teru.

Pour lancer le concert, Aristocrat’s Symphony résonne comme un hymne à la Cour de Versailles version 2010. Pourtant, entre des guitares mal ajustées, un Hizaki cherchant un peu son manche de guitare et un Kamijo qui chauffe sa voix, cette magnifique chanson pâlit un brin par rapport à la symphonie de couleur et de luxe qu’elle est supposée offrir. Mais ne dit on pas que c’est en se jetant à l’eau qu’on profite le plus de la baignade? Le groupe enchaîne avec Shout & Bites qui ajuste quelque peu la balance, tandis que le public est à corps et âme plongé dans le bain. Après quelques instants de répit, Ai to Kanashimi no Nocturne, composition de Teru, change la teneur des eaux qui nous bercent, malgré un torrent de notes commun. Teru s’en donne à coeur joie, Hizaki est enfin irréprochable, Yuki fidèle à lui même, Kamijo en étant de grâce, et Masashi se révèle comme un excellent bassiste.

Mais ce sont les premières notes de Zombie qui déchaînent le public. Après une accélération saccadée, le groupe a atteint sa vitesse de pointe. Zombie est son chef-d’oeuvre metallique. Une chanson transportant les foules, aux sonorités presque pagans, et à la symphonie ajustée au millimètre. Un savant et complexe mélange de brutalité dans la finesse, de torrent de flammes sur un lit de neige fraîche. Le public est conquis.

Kamijo tient son public. Une fois la fougue apaisée, il se dirige nonchalamment vers son micro. D’un regard goguenard il toise la foule et déclame dans un anglais qui... est meilleur qu’avant «I’m beautiful!» Premiers éclats de voix, de rire et de surprise dans une foule séduite par la hardiesse du chanteur. Mais désireux de ne pas s’arrêter là, d’une voix plus langoureuse encore, il annonce «I’m... Special!» puis conclu enfin «I’m yur Purince!» quand la chanson Prince envahit le public qui assimile encore le culot extraordinaire et le charisme du leader.

Après plusieurs chansons issues du nouvel album (que je n’ai malheureusement plus trop précisément en tête) le groupe s'octroie une première pause. Quand le groupe revient sur scène après quelques instants, le vocaliste, notre Purince, n’est pas présent. Chanson instrumentale? En effet, et non des moindres. Silent Knight, chanson épique dans le plus pur style néo-classique se présente comme un dialogue entre les deux guitaristes. Oubliés les premiers instants d’hésitation au début du concert. Hizaki a retrouvé sa maestria et Teru n’en est que plus ravi de se chamailler guitaristiquement avec son petit camarade. Durant près de 5 minutes, une pluie de note rafraîchit l’atmosphère et électrise un peu plus l’ambiance dans une foule plus que jamais acquise à Versailles. Après une nouvelle et brève disparition des membres en coulisses, c’est Teru qui revient seul sur scène pour entonner Reminiscence. Ressemblant dans des moments comme celui ci à un hide réincarné, il affiche un sourire malicieux en jouant cet air frivole, baroque et délicieux. Je vois à mes côtés une Kitsumi médusée qui me confie sa compassion pour tous les pauvres guitaristes de la salle qui ne peuvent qu’être écoeurés devant tant de facilité. Je le lui confirme ^^

Lorsque Kamijo rejoint la scène, il a enlevé son pourpoint, ne gardant que sa tunique blanche. Haranguant la foule en hurlant «We are!» ce à quoi le public réplique frénétiquement «Versailles!» S’ensuivent Catharsis et Gekkakou, puis Amorphous et enfin une magnifique Serenade, tirant une larme à de nombreux fans présents. Jasmin You est nettement toujours dans le coeur des fans, et cette superbe chanson lui rend un hommage poignant qui ne laisse quiconque indifférent.

Devant une salle émue, Kamijo décide d’employer les grands moyens avec une tonitruante Ascendead Master, qui s’emboîte ensuite à merveille avec God Palace, comble du baroque et de la grandiloquence d’un groupe qui semble bénit des Saints. Dans une ambiance chauffée à blanc, Kamijo présente la chanson à venir comme la dernière. Beaucoup semblent attendre The Revenant Choir. Mais c’est Princess qui sonne le glas du concert de Versailles.

Du moins, semblerait-il. Lorsque le groupe quitte la scène, après la présentation du line-up, un dernier salut au public, accompagné des lancés de baguettes/mediators, poignées de mains, une dernière harangue aux fans électrisés et que les lumière se rallument partiellement, la foule a néanmoins du mal à faire revenir le groupe. De timides «Versailles! *clap clap clap* Versailles!» se font entendre, mais aucun n’est reprit majoritairement. Le public est en fait ébahit. Ne réalise-t-il pas ce qui vient de se dérouler sous ses yeux?

Après de longues minutes la torpeur semble enfin quitter les fans qui se mettent enfin à rugir pour faire revenir son groupe favoris. Leur voeu est enfin accomplit quand réapparaissent les cinq membres de Versailles. Comme un symbole de leur retour triomphale sur tapis rouge, Red Carpet Day ravive les brûlots du public, retrouvant presque instantanément son incandescence. Kitsumi rejoint la fosse pour se baigner dans une marée dévouée au groupe, puis Noyle et moi même l’y rejoignons pour profiter nous aussi de ce rappel brûlant. Et enfin, The Revenant Choir en apothéose conclu cette fois ci définitivement le concert. Je profite de cette occasion pour me faufiler au plus profond du coeur de la fosse, toujours plus proche de la scène, où j’atteins les premiers rangs à quelques encablures de mes idoles d’un soir. Cette dernière chanson est une cascade de magma déversée dans nos coeurs et sur nos peaux. Depuis plusieurs chansons les malaises parmi les plus fragiles s’étaient succédés, et les membres du staff distribuaient fréquemment des bouteilles d’eau fraîche pour calmer l’incendie de la fougue fanatique.

Après qu’eurent sonné les dernières notes, le groupe se livra à des adieux plus longs encore et plus poignants qu’avant le rappel. Chaque membre vient saluer son coin de public. Kamijo hurle «We are!» pour que la foule lui réponde «Versailles!» a s’en démettre les cordes vocales. Teru, dernier à partir gratifiera même le public d’un «Merushi» (comprenez Merci... Si Kamijo a fait des efforts de prononciation, déclarant même au cours du concert après quelques mots en anglais «English... Difficult. but french... more difficult!» et d’ajouter quelque chose qu’absolument personne dans le public ne comprend, laissant un gros plan, dont il se marrera devant ce petit bide ponctuel, en revanche Teru aura à progresser pour le prochain passage en France!)

Devant toute cette ferveur qui ne retombe que très lentement, le groupe disparaît définitivement de scène, jusqu’à son retour dans la ville lumière!

Je vois quelques larmes d’émotion versées, qui laissera place à l'exaltation puis à une fraîche mélancolie qui nous frappa tous plus ou moins devant la perfection de l’instant.

Au final, le groupe sera resté presque deux heures sur scène. Malgré les petits soucis de début de concert, les rumeurs se sont avérées erronées concernant le public qui a dans l’ensemble été irréprochable, exception des quelques évanouissements, surtout vers la fin du concert, Hizaki étant même obligé d’évacuer lui même une fan tant le staff était déjà occupé, la prestation vocale de Kamijo frisait la perfection, sans une seule fausse note relevée de tout le concert, les deux guitariste, conformes à leur réputation, bien que celle de Teru soit encore un peu loin de la vérité tant il fait preuve de talent et de facilité, Yuki m’a paru plus aérien dans ses frappes, sachant se faire un peu plus oublier quand il avait tendance à trop couvrir les autres instrumentistes, et enfin, Masashi, malgré sa discrétion a démontré un talent fou pour la basse, et mérite amplement un statut de titulaire dans le groupe tant il fait preuve d’abnégation et d’implication pour le groupe.

Versailles ne m’a absolument pas déçu une seconde. Il confirme sa suprématie dans un visual moderne mais baroque, axé vers le speed metal néo-classique, et pose son statut de référence scénique comme le furent X Japan en son temps.